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Paradise & Winchester. YANN NOVAK
(Unfathomless 2012)

Review by Flavien Gillié

Un frémissement peut-être.

Yann Novak propose pour Unfathomless une pièce d’un seul tenant, une quarantaine de minutes issues d’enregistrements à Paradise et à Winchester, deux faubourgs de Las Vegas. L’artiste a procédé à dix collectes sonores en ces lieux, qu’il a ensuite retraités.

Loin de tous les clichés des casinos aux lumières artificielles, l’artiste côtoie plutôt ici la nuit et le désert, les limites de la ville, l’usure de ses habitants que l’on ressent dans la captation de paroles blafardes. L’attention se fait sur des résonances, peut-être naturelles, le vent chaud qui emmène du sable jusque dans les plus petits interstices des micros et des magnétophones, ou bien d’autres plus artificielles, des souffles de ces climatiseurs qu’on imagine énormes, machinerie haletante de ces temples ouverts la nuit comme le jour.

L’on pourra éprouver du dédain pour ces lieux, construits avec une pitoyable fierté pharaonique, mais voilà, ils sont là désormais, et plutôt que d’en être consommateur, Yann Novak choisit ici d’en écouter les rumeurs, un judicieux pas de côté qui permet d’apprécier la ville sans son fard et ses artifices.

On perçoit aux deux-tiers de l’oeuvre un semblant d’apaisement, comme la nuit qui le céderait au jour, la ville qui voudrait laisser croire qu’aujourd’hui sera différent d’hier. Les voix présentes se perdent vite dans une nuée de réverbération, peut-être la chape de plomb d’un soleil trop lourd, et là se joue dès lors une mise en branle de la machine-ville, les bus viennent transporter jusqu’au centre ceux des banlieues dont on sait qu’ils sont nécessaires à l’entretien et au bon fonctionnement des rouages, au simulacre du décor, chaque lieu devra être remis en semblant d’état, et tandis que les humains se perdent dans le lointain, des criquets viennent rappeler leur présence, une manière de nous dire qu’ils étaient là avant, et qu’ils y seront bien longtemps après nous.

Cette nouvelle parution chez Unfathomless contient tout ce que l’on peut apprécier d’un album basé sur des field recordings, l’exigence, la qualité, et la (re)découverte de nouveaux endroits que l’on aurait de prime abord qualifié de lieux communs.

Flavien Gillié – Traduction par Sismophone

yanno

[Yann Novak, photo courtesy of Matter]

– Translation to English 

Maybe a shiver.

Yann Novak offers Unfathomless a single piece, around forty minutes out of recordings made in Paradise and Winchester, two suburbs of Las Vegas. The artist realized ten sound collections in those places that he later reworked.

Far from all clichés of casinos with artificial lights, Yann Novak rather neighbors night and desert, outskirts of the city, the wear of it’s inhabitants, felt even in the recording of wan words. Attention focuses on resonances, some maybe naturals, hot wind bringing sand into the smallest slits of microphones and tape recorders, and some other way more artificials, blows of these air conditioners that one figures enormous, gasping machinery of day and night temples.

One could feel disdain for such places, built with a so pityful pharaonic pride, but here it is, they stand now and rather than being their customer Yann Novak chooses to listen their murmurs, a wise step aside allowing to enjoy the city cleared of make-up and artificiality. Around the two thirds of the opus, some soothing is perceivable, as if night would vanish as day arises, the city willing to make-believe that today is a different day. Present voices are quickly absorbed in a swarm of reverb, maybe the astounding weight of a too heavy sun, and then starts the shaking of the machine-city, buses shuttle to the center those from the purlieus that are necessary to clean up and watch it’s cogs, responsible of this decor enactment, every place has to be more or less tidied, and while human beings vanish faraway, crickets recall their presence, a way to claim their possession of the area, long before us and long after us.

This new release on Unfathomless contains everything that one can enjoy on a field-recording based album, exigence, quality and (re-)discover of new places at first limned as common places.

*by Sismophone

Yann Novak website
Unfathomless website