Unsafe escape apparition London. SALA
(Green Field 2012)
Cathédrale rieuse comme une fleur exquise
Sur sa tige dressée dans l’urine des chiens
Lorsque les papiers volent le marcheur se souvient
Qu’il a souvent marché et qu’il ne marche plus
Et le voilà courbé.
Gérard Manset – Le coureur arrêté.
Audrius Simkunas (SALA) nous donne ici à entendre son récit d’une ville, à l’usure, l’expérience initiatique de son voyage à Londres.
Ville tentaculaire entre toutes, il l’a arpentée, physiquement ressentie, comme un mur de sons dans lequel il a recueilli de possibles échappatoires, et parvient ici à nous prouver que oui, la ville n’a pas besoin de nous pour exister, mais que si nous ne sommes pas là pour l’écouter elle n’est rien.
On imagine l’artiste visitant la National Gallery, arrêtant alors sa marche pour contempler la toile de Turner, Pluie, Vapeur et Vitesse – Le Grand Chemin de Fer de l’Ouest, et de ce choc visuel nous en donner son interprétation sonore.
La pièce de SALA m’évoque aussi une stratification réussie, un peu comme on se surprend parfois à rêver devant une vieille maison détruite, où les murs béants laissent apparaître des restes d’ancienne vie, papiers-peints, trace des escaliers, délimitation des espaces devenus visibles du dehors. Ici l’artiste joue avec des oppositions audacieuses, le ventre de la ville et ses tunnels métropolitains co-existent avec de lointaines cloches, cathédrale engloutie, oiseaux d’un jardin évoquant l’apaisement retrouvé, le jardin secret jalousement protégé, havre de paix pour finir la journée.
On se dit aussi qu’il a dû prendre des risques, jouer avec son épuisement, mais on sait aussi que la ville est source d’énergie perpétuelle, porte nos pas bien plus loin que nous ne l’aurions imaginé, nous fait oublier le besoin de sommeil, tout est à vivre dans l’instant présent, on se reposera après le voyage, à la campagne si elle existe encore, en ces contrées silencieuses où la nuit est vraiment noire.
Ici il y a l’urgence, la peur de ne pas tout découvrir, même si l’on sait que c’est illusoire, pour tout en connaître il faudrait y vivre, mais peut-on vraiment y vivre, je veux dire, y vivre en permanence et garder la fraicheur de l’écoute, l’émerveillement renouvelé?
Audrius Simkunas est à présent retourné en Lithuanie, on lui souhaite d’autres voyages, d’autres intensités, qu’il nous donne encore à ressentir cette puissance urbaine. Une chose est sure, Londres ne sera plus jamais la même quand nous y retournerons.
-Flavien Gillié
[fragment from the London Underground map]
(Translation to English)
In this piece Audrius Simkunas (SALA) tells us the story of a city, a first experience of his trip to London. As an ever growing city he had to fight and felt an almost physical wall of sounds in which he has sought different ways to escape. He has proven us that although the city doesn’t need us to exist, without us to listen, its meaning becomes non-existent.
We imagine the artist visiting the national gallery, holding his steps to watch Turner’s painting “Rain, Steam and Speed – The Great Western Railway “, giving us his sonorous interpretation of this visual shock.
SALA’s piece evokes a successful stratification, like one can feel when standing in front of an old destroyed house. Open walls showing traces of old forgotten life, wallpapers, rests of staircases, rooms becoming visible on the outside..
The artist plays with some bold contrasts; the city’s belly and its metropolitan tunnels coexist with remote bells, an absorbed cathedral, and birds in a garden evoking the return of calmness, a secret garden, and haven of peace at the end of the day.
We could say that he had to take risks, had to play with exhaustion, as we know how every city is a source of perpetual energy, taking us (not) much further than we imagine, making us forget the need for sleep, everything being lived at the very moment. We will rest when back at the countryside, after the trip, if still existing, where the night is silent and the dark is really dark.
We can feel a certain urgency here, a fear to not be able to discover everything, even though we know it is illusory. To know something we need to live something. The question is if we can really, I mean permanently, keep the same freshness of listening to something for the first time, a renewed wonder?
Audrius Simkunas went for the moment back to Lithuania; we wish him a lot more traveling, more intensive experiences so he can make us feel more of this urban power. One thing is certain; London will never be the same again.
-Flavien Gillié, translation by Mia